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Donnez-nous de l'ombre !

Donnez-nous de l’ombre !

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A l’heure où la 9ème conférence internationale sur le climat urbain réunit à Toulouse 600 scientifiques pour plancher sur la question de « l’îlot de chaleur urbain », n’avons-nous pas envie de pousser ce cri du coeur qui est aussi un élan de bon sens : « Donnez-nous de l’ombre ! »
De l’ombre, mais pas n’importe laquelle. Foin de l’ombre des parasols et autres stores, foin de celle des vérandas et abris béton de toutes sortes, et que dire de l’ombre rachitique de ces rangées d’arbres circoncis qui font potiche dans nos rues et sur nos places ?
Donnez-nous de l’ombre fraîche et vivante, de l’ombre qui bruisse et qui s’étend, de l’ombre qui sent bon la sève, accueille la brise et nous souffle de l’air dans le cou, de l’ombre qui nous fait soupirer d’aise et nous repose, sous laquelle nous avons envie de nous attarder.
Cette ombre oubliée à laquelle nous aspirons, c’est bien entendu celle des arbres qu’on laisse être eux-mêmes.
Nous avons dans notre inconscient collectif ou dans nos souvenirs, l’ombre bénéfique d’un grand arbre, tilleul ou platane souvent, qui s’étale sur une place de village où les gens restent, et passent du temps. Car, il faut bien en convenir, les lieux urbains où s’épanouissent les arbres sont des lieux de vie très recherchés. Sous un soleil de plomb, que préférons-nous ? Une terrasse de café sous l’ombre des seuls parasols, ou l’ombrage mouvant et frais des végétaux ?
N’avons-nous pas rêvé, lorsque nous nous garons sur un parking de supermarché à autre chose que ces arbres-plots, plantés pour la forme, qui n’ombragent que leur propre pied ? N’avons-nous pas espéré, dans les maisons de retraite, à autre chose qu’une cour en goudron avec un ou deux bancs en plein soleil ? Et dans les cours des écoles, où sont les marronniers, où sont les grands tilleuls ?
Nous avons alors des interrogations, bien légitimes : Pourquoi les arbres respectés sont-ils maintenant si rares ? Pourquoi les a-t-on arrachés, pourquoi ne les laisse-t-on pas se développer ? Pourquoi les places centrales des grandes villes ont-elles été vidées de leurs grands arbres centenaires, laissant la place au pavé, à l’espace nu, et à quelques jets d’eau pour la forme. Pourquoi sommes-nous accueillis dans les bourgs par ces rangs d’arbres rachitiques et torturés, qui ont la hauteur qu’il faut, le feuillage ramassé qu’il faut, qui font propre certes, mais qui nous tordent le coeur, lorsqu’à la mauvaise saison leur charpente est mise à nu : ce ne sont que troncs couverts d’escarres, noeuds et moignons maladifs, formes mutilées. Sous ces arbres là, on passe vite, en baissant la tête, évitant d’y penser.
Ou pire, on ne les voit pas.
Car enfin, tous ces arbres-plumeaux, ces arbres-pinceaux, ces arbres-troncs, à quoi servent-ils ? En vertu de quel plan d’urbanisation ou de végétalisation sont-ils traités ainsi ? Sont-ils des arbres d’ornement ? On a du mal à le croire.
Ces arbres ne sont pas beaux, charcutés comme ils sont en dépit des règles les plus élémentaires de taille arboricole. Ils sont moches, oui, et qui plus est, ils ne servent à rien. Car ils ne donnent ni ombre, ni fraîcheur, et ne contribuent pas à rendre plus agréable l’espace de vie.

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A l’heure, donc, où les spécialistes s’interrogent et préconisent mille solutions, à l’heure où la chaleur emmagasinée par la pierre et le bitume fait exploser le thermomètre urbain, pourquoi ne pas laisser primer le sens pratique, et revenir aux savoirs ancestraux, issus d’enseignements dont nous gardons tous la trace ?
Pourquoi, enfin, ne pas redonner aux arbres de l’espace public le moyen de faire ce qu’ils savent si bien faire : nous donner de l’ombre, et de l’air (pas seulement de l’oxygène, mais
embrasse à bras ouverts, et qui nous fait nous sentir vivants).
Commençons donc par traiter correctement les arbres qui nous entourent. C’est une solution simple à la question du climat. Pas seulement une affaire de respect.
Mais de bon sens.
Emmanuelle Maisonneuve
Juillet 2015

 

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